Surveillance de la consommation de médicaments :
Un rapport accablant qui n’apporte aucune solution

Le rapport des professeurs Dominique Costagliola et Bernard Bégaud sur la surveillance et le bon usage du médicament dresse un constat accablant de la situation française. L’Initiative Transparence Santé déplore l’archaïsme des propositions émises dans ce rapport.

Paris, mercredi 18 septembre 2013

Surconsommation, prescriptions non conformes, usage irrationnel, iatrogénie médicamenteuse... Le rapport des professeurs Dominique Costagliola et Bernard Bégaud « sur la surveillance et la promotion du bon usage du médicament en France », publié lundi 16 septembre pointe une nouvelle fois les défaillances de notre système de régulation de la consommation médicamenteuse.

« L’impact sanitaire et économique des prescriptions et de l’utilisation hors recommandations des produits de santé en France est, de toute évidence, considérable », pointent les auteurs de ce rapport, qui estiment à plusieurs centaines de milliers de cas par an le nombre des maladies et complications qui pourraient être évitées par une prise en charge optimisée et une réduction de la iatrogénie. Rappelons qu’en France, 18 000 décès chaque années sont liés à la prise de médicaments dont le tiers serait attribuable à des prescriptions injustifiées.

Les auteurs du rapport précisent qu’en matière de surveillance de la consommation médicamenteuse, la France accuse un large retard par rapport à de nombreux pays. « Les causes de cette exception française, ajoutent-ils, sont probablement nombreuses et dépendantes en bonne part de l’organisation de notre système de soins et de remboursement ainsi que du faible niveau de culture de santé publique qui caractérise notre pays ».

Un constat évident, des solutions d’un autre âge

Chaque année, ce sont plus de dix milliards d’euros que l’Etat jette par les fenêtres du fait des dérives de consommation et de ses conséquences sur la santé des Français. Ce constat n’est pas nouveau – l’Initiative Transparence Santé, le martèle depuis son lancement en janvier. Le rapport remis à la ministre de la Santé Marisol Touraine a le mérite d’enfoncer le clou. L’Initiative déplore toutefois que les solutions proposées n’apportent aucune amélioration au dispositif existant de surveillance de la consommation médicamenteuse.

Principal levier d’amélioration pointé par les auteurs du rapport : la connaissance en temps réel de ce qui se prescrit à qui, comment et pourquoi. Enfin le terme est prononcé ! Il reste à voir ce qui se cache derrière cette belle déclaration d’intention. L’analyse en temps réel du flux de données transitant chaque jour vers la base de l’Assurance maladie « constituerait un outil de veille sans équivalent et permettrait de piloter sans regarder dans le rétroviseur », rappelait il y a quelques mois Jean Yves Grall, Directeur général de la Santé.

Les infrastructures qui permettraient d’effectuer un tel suivi sont disponibles. Sauf que les solutions proposées dans ce rapport ne précisent en aucun cas comment elles pourraient être utilisées et surtout comment cette surveillance en temps réel pourrait être mise en place.

Une rétention « criminelle » des données de santé

Les auteurs du rapport proposent la création d’une structure sensée organiser et faciliter l’accès aux différentes sources de données en santé, celles notamment en provenance de l’Assurance maladie. Un nouveau « machin » piloté par les pouvoirs publics qui ne fournirait l’information qu’aux autorités et agences partenaires, étudiant au cas par cas les demandes des chercheurs. S’il ne s’agit pas de nier le rôle qu’ont à jouer ces acteurs, pour quelles raisons seraient-ils les seuls à disposer de ces informations ?

L’Initiative déplore qu’encore une fois on prévoit d’exclure la société civile et les sociétés privées de l’accès aux données de santé. Le partage des expertises est essentiel au développement de la connaissance et à la mise en place de solutions innovantes visant à améliorer la régulation de la consommation médicamenteuse. « Ces sujets sont si lourds qu’il ne faut jamais, quelle que soit la qualité des hommes, faire l’impasse sur des expertises contradictoires », déclarait en mai dernier Christian Babusiaux président de l’Institut des données de santé.

Il y a quelques jours, Gilles Babinet, ancien président du Conseil national du Numérique et représentant de la France sur ce sujet auprès de la Commission européenne, estimait dans la presse « qu’il est à proprement parler criminel de retenir les données de santé, de ne pas les ouvrir. Il faut faire des choix entre les intérêts individuels et collectifs et ce sont ces derniers que l’Etat doit servir ».

Les pouvoirs publics ont largement fait la preuve de leur incapacité à assurer un pilotage efficace de la politique du médicament et de fait à assurer la sécurité des citoyens. Il est temps maintenant qu’ils permettent aux autres acteurs oeuvrant dans le domaine de la santé de s’en saisir et de faire valoir leur expertise.


A propos de l’Initiative Transparence Santé


L’Initiative Transparence Santé est un mouvement citoyen rassemblant divers acteurs impliqués en santé (journalistes, représentants d’usagers du système de soin, chercheurs en santé publique, assureurs, entrepreneurs ou consultants).

Ce collectif est né du constat que les données qui composent le paysage de l’offre sanitaire en France sont aujourd’hui quasiment inaccessibles à la société civile. Cette situation explique pour bonne partie, selon l’Initiative, les dérives du système de soins comme l’explosion des dépassements d’honoraires ou encore le mauvais usage des médicaments. Notre démarche a été lancée le 24 janvier 2013 avec la publication du manifeste de l’Initiative Transparence Santé qui peut être consulté sur notre blog.


b
n
 

A propos du débat pour l’ouverture des données de santé :

Les pouvoirs publics, l’Assurance maladie notamment, détiennent une manne d’informations relatives à l’utilisation et au fonctionnement de l’offre de soins en France.

Tarifs des professionnels, des produits de santé, des hôpitaux, informations relatives à la qualité et à la consommation des soins, rapports d’activité des caisses primaires d’assurance maladie, efficacité des médicaments, qualité de la prescription...

Ces données qui composent le paysage de l’offre sanitaire sont aujourd’hui quasi inaccessibles aux acteurs du secteur souhaitant informer les usagers.

De ce constat, est née l’Initiative transparence santé, un regroupement d’acteurs de la société civile en provenance d’horizons divers. Nous défendons la position qu’un partage plus large des données sur le système de soins améliorerait la transparence sur son fonctionnement et ses performances et encouragerait le développement d’outils permettant à l’usager de comparer le coût et la qualité des services de santé.

Ces objectifs peuvent être atteints dans le strict respect de leur anonymat qu’en aucun cas évidemment nous ne remettons en cause.

Contact Presse :         Yann AUBE
 

06 82 22 00 71

 

initiative.transparence.sante@gmail.com

Vous ne souhaitez plus recevoir d'e-mails de Initiative transparence santé ? Faites le nous savoir.